États-Unis : les autorités face à la mobilisation étudiante08/05/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/05/une_2910-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis : les autorités face à la mobilisation étudiante

Partie d’universités privées renommées, la mobilisation des étudiants américains s’est rapidement étendue. À l’université Columbia de New York, les autorités ont fait intervenir des centaines de policiers pour évacuer les protestataires, le 19 puis le 30 avril.

Les arrestations ont été massives, près de 2 400 dans tout le pays. Les médias dépeignent, en continu, les protestataires comme violents et antisémites, voire comme des nazis.

Depuis le 7 octobre, une fraction de la jeunesse étudiante s’est éveillée à la politique en découvrant la barbarie des bombardements à Gaza, menés avec des dollars et des bombes made in USA. En réaction à l’évacuation de Columbia, des étudiants de nombreux campus ont installé leur propre campement. Ils ont résisté aux arrestations et aux menaces d’exclusion – une menace sérieuse pour certains étudiants, endettés sur dix ou vingt ans pour payer des droits d’inscription allant jusqu’à l’équivalent de 80 000 euros par an. Des villes démocrates du Nord aux États républicains comme le Texas, ce mouvement est devenu national, pour la première fois depuis des années.

Le nombre des « campeurs » n’est pas massif, mais leur force est d’exprimer un sentiment largement partagé parmi les étudiants. En journée, des centaines d’entre eux et des habitants du quartier viennent s’installer autour, en soutien, et profiter de l’ambiance conviviale. Dans l’univers consensuel des campus américains, si loin de Gaza, les interventions policières violentes ont levé le voile d’hypocrisie et choqué beaucoup d’étudiants.

Les républicains comme les démocrates, y compris Joe Biden, alimentent une campagne calomnieuse. Eux qui fournissent les bombes qui tuent à Gaza, accusent les manifestants de violence antisémite ! C’est une calomnie, les contestataires étant massivement opposés à l’antisémitisme, et cela encourage les agressions dont ils sont victimes. À Los Angeles, un des principaux campements du pays a été attaqué de nuit par des centaines de militants sionistes et d’extrême droite. La police a attendu deux heures pour intervenir, sans arrêter le moindre agresseur.

Il est vrai que les choix politiques des organisateurs des campements, refusant de critiquer le Hamas, repoussent bon nombre d’étudiants sympathisants du mouvement, en particulier des étudiants juifs, qui en majorité rejettent les bombardements, et se retrouvent désemparés. Les revendications principales sont la transparence et le « désinvestissement », c’est-à-dire la rupture des liens économiques entre telle université et Israël ou l’appareil militaire américain. Mais cela revient aussi à reprocher au gouvernement des États-Unis de soutenir la politique d’Israël – ce qui choque à juste titre – sans réaliser qu’Israël n’est que l’instrument d’une guerre au Proche- Orient qui est précisément celle de l’impérialisme américain lui- même.

Les dirigeants américains, eux, le voient bien. Ils savent que la population américaine est largement opposée à la guerre, mais ils veulent la préparer à l’accepter. C’est pourquoi, malgré ses limites, la contestation étudiante leur pose un problème politique. Si le pouvoir choisit la démonstration de force, c’est qu’il se souvient de la guerre du Vietnam, et veut éviter que les campus deviennent un pôle de contestation durable. Mais leur choix montre aussi aux étudiants que le problème est plus profond qu’ils ne le croyaient. La guerre est dans la nature de l’impérialisme, et c’est lui qu’il faut abattre.

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